Journal d'un chambardement

L’Hôpital Joffre-Dupuytren, hôpital gériatrique situé à Draveil (Essonne) dépendant de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, est pris dans une tourmente qui remet en cause jusqu’à son existence même.

Pour la première fois depuis longtemps, le mouvement de révolte des personnels inclut une mobilisation des médecins du site face à des annonces de restructurations avivant les pires craintes.

C’est dans ce contexte, et pour mettre sur la place publique le journal des évènements afin que chacun puisse suivre leur déroulement en connaissance de cause, que le Collectif des Médecins de l’Hôpital Joffre-Dupuytren entreprend la rédaction de ce blog.

vendredi 2 avril 2010

Projet gériatrique : explication de texte

La réflexion ne s'alimentant utilement que de données concrètes, et la dispersion de ces données étant la règle dans le maquis des documents administratifs, un petit point sur les enjeux chiffrés du débat sur la gériatrie et sur les arguments des uns et des autres n'est pas inutile.



A la lecture du Plan Stratégique de l’AP-HP pour la gériatrie, on observe que de 2005 à 2009, le nombre de lits de SLD (Soins de Longue Durée) a diminué de 708 lits, aboutissant à un existant de 3638 lits de SLD fin 2009. Leur compensation partielle, à hauteur de 520 lits, était prévue par la construction d’EHPAD (Etablissement d'Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes) dont aucun n’a vu le jour.

Concernant le SSR (Soins de Suite – Réadaptation), l’ouverture de 1000 lits était prévue sur la même période, et ne s’est en pratique élevée qu’à hauteur de 235 lits. Les lits existants (estimés avec une hypothèse de taux d’occupation de 90%) s’élèvent à 4422 au total du SSR, dont 2824 pour la seule gériatrie (Comment estime-t-on un nombre de lits existants sous une hypothèse de taux d'occupation ? Voilà un mystère technocratique qu'il faudra un jour clarifier ...).



Pour 2010-2014, l’AP-HP vise plusieurs objectifs :

  • développer les SSR spécialisés (la gériatrie n’étant que l’un d’entre eux). Pour ce faire, elle envisage une réduction de la durée moyenne de séjour (DMS) en SSR gériatrique, évaluée à -10% par an pendant 5 ans pour la rapprocher à celle des structures non AP-HP comparables (en fait l’écart de DMS constaté est de l’ordre de 20%), permettant de libérer autant de lits devenus disponibles pour les affecter aux SSR spécialisés non gériatriques. La DMS en SSR gériatrique passerait ainsi de 58 à 35 jours, permettant la libération en 5 ans de 619 lits, soit 111 sur Joffre-Dupuytren. Les besoins à couvrir en SSR spécialisés non gériatriques sont évalués à 455 lits (les besoins supplémentaires en gériatrie ne sont pas estimés, c’est-à-dire évalués à zéro),
  • développer les spécialisations au sein du SSR gériatrique (déjà spécialisé de fait à hauteur de 1/3 des lits de SSR gériatrique),
  • rapprocher la prise en charge des patients de leur domicile. Prenant le cas des patients parisiens envoyés en SSR en grande couronne (évalué à 20% des patients en SSR en grande couronne), elle envisage le rapatriement des lits correspondants dans Paris. C’est le cas pour l’ouverture de Rothschild, au dépend de lits prélevés sur Joffre-Dupuytren (68), Georges Clemenceau (37), et Charles Foix (85) (soit un total de 190 lits prélevés). La démarche envisagée serait comparable pour l’ouverture à venir de Corentin Celton, sans que les prélèvements soient encore précisés. L’arrêt progressif sur 3 ans du recrutement de patients parisiens en grande couronne aboutirait à un gain de lits dans les hôpitaux concernés de 166 lits, dont 75 sur Joffre-Dupuytren,
  • augmenter l’attractivité de la gériatrie pour les médecins et le personnel non médical, et développer sa dimension hospitalo-universitaire,
  • créer des filières gériatriques complète sur chaque Groupe Hospitalier,
  • adapter la dimension et la répartition de l’offre de soin aux besoins du terrain.


Les arguments opposés concernent :

  • la sur-évaluation du nombre de patients parisiens dans les SSR de grande couronne. De fait, leur proportion est proche de zéro depuis quelques années, les chiffres de l’AP-HP semblant dater d’une époque antérieure ou inclure des patients parisiens retransférés vers l'AP-HP par des SSR extérieurs en bout de prise en charge (c'est-à-dire à l'issue de la durée de séjour butoir qu'ils se sont donnée),
  • l’absence de comparaison possible entre la DMS à l’AP-HP et dans les structures non AP-HP du fait de leur liberté de sélectionner à l’entrée les patients les moins lourds, et de leur habitude d’adresser les patients atteignant la limite de la durée de séjour vers les SSR de l’AP-HP,
  • la contradiction entre l’objectif de réduire la durée de séjour en SSR et celui de réduire la capacité d’accueil des SLD pouvant les accueillir,
  • les perspectives démographiques prévoyant une stabilité dans les années à venir de la population gériatrique parisienne mais surtout une croissance massive de celle de grande couronne, particulièrement en Essonne,
  • la contradiction entre le désir de rendre la gériatrie attractive et la réalité d’une inquiétude sur l’avenir à court terme des personnels.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire