Pour ce qui est de l’hôpital public, il devint soumis aux règles de la comptabilité publique. Le budget de chaque hôpital n’aboutit, dans cette évolution, qu’à être grossièrement informatif, reprenant d’année en année dans son financement le déficit de l’année antérieure. Telle était la situation qui prévalait encore au milieu des années 80 : des médecins au contrôle des soins donc de la dépense, une administration centrale en charge du comblement annuel des dépenses nouvelles, une administration locale en charge de la coordination et la bonne gestion du système sur le terrain.
Joseph Joffre (1852 -1931)
Soudain, on s’aperçut que ce fonctionnement laissait libre cours aux dérives de dépense. A cette époque se construisit l’adage : « Si la santé n’a pas de prix, elle a un coût », qui présida à la définition au niveau national d’un budget global de la santé, dit ONDAM (Objectif National de Dépenses d’Assurance Maladie), qu’il fallut répartir entre chaque structure de soins dans le cadre d’un financement limité et prédéterminé dit « Enveloppe globale ». Plus de rattrapage budgétaire qui tienne : chaque établissement eut son budget prévisionnel à ne dépasser sous aucun prétexte.
Mais les dérives budgétaires persistaient. Naquit alors l’idée, dans un souci d’équité et de transparence, de faire dépendre au plus près le financement de chaque hôpital de la réalité de son activité : on inventa la T2A, ou Tarification à l’Activité, encore en vigueur de nos jours. Le principe en est lumineusement simple : les modalités de prise en charge d’une maladie donnée étant codifiées, le cours de l’évolution de cette affection sous ce traitement doit être prévisible et relativement uniforme, et les coûts afférents doivent donc être standardisables. Ainsi, à chaque pathologie peut être affecté un coût moyen, qu’il suffit d’additionner pour calculer les recettes de l’hôpital qui prend en charge ces patients. On avait réinventé le paiement à l’acte, en l’appliquant à l’hôpital, et en redéfinissant au passage l’acte comme la prise en charge d’une pathologie et non plus celle d’un patient avec ses aléas de parcours.
Mais rien n’y faisait, les dérapages budgétaires étaient encore trop largement répandus. Où pouvait donc résider la fuite ? Si le système, pour raffiné qu’il soit, ne parvenait pas à endiguer les dépenses, ce devait être en réalité la maîtrise du système qui posait problème. Peut-être alors suffirait-il de changer les hommes pour retrouver une rigueur budgétaire. Ainsi naquit l’idée d’une « Nouvelle Gouvernance » faisant reprendre en main par l’administration les choix stratégiques de chaque hôpital. Les chefs de service se virent adjoindre l’aide d’un Cadre Administratif. Les services eux-mêmes furent enjoints de se regrouper en Pôles destinés à faire jouer des synergies, et permettant de réduire le nombre des interlocuteurs médicaux face à l’administration. Les instances hospitalières se virent concentrées au sein d’un Directoire ou d’une Cellule de Direction. Et pour couronner le tout, des Agences Régionales d’Hospitalisation furent créées, bientôt rebaptisées Agences Régionales de Santé.
Indépendamment des personnes, dont le caractère et l’ouverture pouvaient continuer malgré tout à s’exprimer selon leur personnalité, les structures étaient ainsi prêtes pour une large remise en ordre des finances hospitalières et du fonctionnement des hôpitaux.
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